PIERRE EBELI
extraits
Le syndrome Dubost before Hannibal
Un pas, un autre, un troisième, en équilibre... la chute, se redresser, recommencer.
Un pas, un autre, un troisième, en équilibre... ça passe... comme un enfant qui naît à la
vie debout, prêt a en affronter la racine qui sort de terre pour mieux y replonger, le torrent
impétueux qui cache sa roublardise, l’orage qui éclate sans crier gare, l’éboulis qui croule
du poids de ses pierres et cherche à s’en débarasser, le buisson ardent toute épine dehors, la
branche traîtresse qui barre le passage, le sentier qui se cache, qui se joue des regards...
Un pas, un autre, un troisième, un peu plus sûr, le visage face aux monts, démons ......
et merveilles, aux l’allures souveraines et infranchissables, dressés sur le chemin de
l’émancipation. Franchir pour s’affranchir. Se battre pour ne plus avoir à se battre. Épuiser ses
forces pour trouver autre chose que la force.
Un pas, un autre, un troisième, un quatrième, un cinquième, en équilibre... encore
la chute, se redresser à nouveau. Réinventer l’itinéraire ? A gauche ? A droite ? Rebrousser
chemin ? L’impasse ? Sûrement pas. Tout droit, pousser, tirer, treuiller, soulever, douter,
s’arrêter, renoncer, regretter cet inutile combat... Je ne suis qu’un prince sans royaume, un roi
sans trône et sans peuple, les pieds creusés de sillons douloureux, les reins battus de milliers
de coups, le souffle court, les mains brulées par la corde qui fuit, le rêve anéanti par tant
d’incertitude... Renoncer ? Sûrement pas, se maudir de si faibles pensées, se renier de son soi
sans croire qu’il en soit possible, en bref, repartir.
Un pas, un autre, un sixième, un septième, en équilibre... rejeter ce vide intérieur ;
puiser une énergie insoupçonnée à la source même de ses faiblesses ; se réclamer de l’enfer en
lui donnant ses tripes ; s’élever sans foi, fort de toute son humanité, pour demander pardon ;
croire à tous les possibles en mesurant sa solitude et voir surgir au détour du chemin le
réconfort de bras neufs et généreux portés par l’envie d’accomplir. Plus tard, à l’heure où les
ombres grandissent viendra le partage, du pain, du vin... et des émotions ressenties. Encore
plus tard, le sommeil gagnera chacun et chacun y retrouvera ses rêves.
Au lendemain, réparé des griffures d’hier, gonflé par la fierté d’arriver au bout, habité
d’une volonté indéfectible, reconstruit par l’élan solidaire, recommencer. Un pas, un autre, et
celui qui libère enfin, et sous ses yeux ébahis, la vallée qui s’ouvre, juste là, grandiose. Voir
jaillir l’eau pure de la source, du cœur de la roche, et se dire que la beauté, l’amour, peuvent
sortir de soi de la même manière. Retrouver l’énergie en l’absence de toute force, revenir à
la naissance de la vie debout, comme l’enfant originel : un pas, un autre, un troisième... en